mardi 24 mai 2011

La route - Cormac Mac Carthy

-Mode mauvaise humeur ON- J'aime pas les références bibliques dans les romans. Je n'y connais rien et ça m'énerve. Souvent ça teinte la littérature de mièvrerie, et je marche pas. Oui je sais il y a un trou béant dans ma culture. Et alors ? - Mode mauvais humeur OFF-

Malgré les références bibliques, qu'on trouve dès le début du roman, je l'ai lu jusqu'au bout. Parce qu'il y a quelque chose de fascinant dans l'écriture de Cormac Mac Carthy. Un père marche sur la route avec son fils, dans un monde dévasté, plusieurs années plus tôt, par des incendies et d'autres phénomènes apocalyptiques et guerriers qui n'ont rien laissé de vivant, à part quelques humains dont certains dévorent les autres. On ne sait rien des personnages, sauf qu'ils s'aiment, que le petit n'a jamais connu le monde d'avant le désastre et que sa mère a préféré prendre la tangente des années plus tôt en disparaissant, probablement pour se suicider. On ne sait rien de plus, ni de ce qui s'est passé, ni de l'histoire des personnages avant le début du livre, ni même de ce qui fonde leur espoir. L'auteur prend donc le parti de nous laisser penser qu'en dehors de ce qu'il raconte, les personnages et le décor n'ont pas d'existence, pas de passé, ni d'avenir. C'est rare chez les romanciers, courageux et très (trop ?) honnête !
Mais ce qui m'a fait rester sur cette route, c'est surtout que, dès les premières pages, j'ai eu froid. Malgré la chaleur qu'il fait chez moi en ce moment, malgré la sécheresse, ce livre m'a transie de froid et d'humidité. Dès qu'on l'ouvre, tout est gris, on entend tomber la pluie sur la bâche. Quand on ferme les yeux, on voit l'obscurité totale qui enveloppe les personnages, la nuit, quand ils n'ont plus de lumière. C'est ce qui est remarquable dans ce roman. A mon avis, ça fonctionne pour deux raisons : Techniquement, le vocabulaire est très précis et rien, dans les descriptions, n'est laissé au hasard. Sur le plan de la construction, puisqu'il n'y a rien d'autre que ces descriptions (peu de péripéties, presque pas de souvenirs, pas de perspectives ni d'espoir, pas d'explications) le lecteur se raccroche forcément à ce qui reste : le vent, la pluie, la mort, la grisaille. Envahissants.
Mais le parti pris de ne laisser d'existence à ces personnages que le temps de l'histoire prive le roman d'une part de sa crédibilité et de son intérêt. Les dialogues, qui pourtant sonnent juste, finissent par s'appauvrir et sonner creux. L'absence de péripéties devient ennuyeuse dans le dernier tiers du bouquin. Bref, vers la fin, j'ai eu hâte de sortir de cette galère ! 
Et, bien sûr, j'ai surtout regretté qu'il n'y ait aucun commentaires sur ce qui a conduit à ce désastre. Mais si Cormac Mac Carthy avait voulu faire un roman écolo, ce ne serait pas le même bouquin !